lundi 19 mars 2018

Première nav' de nuit... peu concluante !

Dans nos emplois du temps bien chargés, nous avons toujours assez peu de créneaux pour naviguer, ce qui nous oblige à sortir quand on a le temps plutôt que quand les conditions sont favorables. Même s’il est évident qu’avant de sortir nous vérifions la météo pour ne pas nous mettre en danger.
Mais voilà, cette semaine, Sylvain me propose de faire une navigation de nuit. La journée de samedi est déjà occupée, nous décidons donc de partir dans la nuit, après avoir passé la soirée chez des amis. L’objectif est de naviguer de nuit, puis de mouiller quelques heures à proximité de Sète avant de revenir.
Soit. Nous arrivons au bateau à minuit et demi, et dormons un peu avant de préparer le bateau pour larguer les amarres à 4h du matin. Les potes Fanch et Mica sont de la partie, et Fanch propose généreusement de faire le départ avec Sylvain.
4h. Les pas sur le pont, puis le moteur qui démarre me réveillent. J’espère me rendormir vite, car les nuits précédentes ont été courtes, et j’ai des révisions à faire le dimanche, dès que j’en aurai la possibilité (je passe un examen dans 2 semaines). Mais je ne cesse d’entendre la marche arrière rugir, et vois les mâts d’à côté par mon hublot : la sortie du quai semble difficile et la manœuvre durer une éternité.  J’hésite à me lever pour les aider, mais dehors ça doit bien cailler, alors je mise sur le fait que les hommes vont finir par y arriver. Le cirque dure un moment, puis je finis par voir danser les lumières du port dans ma cabine : nous voilà enfin en train de le traverser.

La Capitainerie. Crédit photo: Fanch
Alors que je me rendors enfin, mon sixième sens hors du commun m’indique que nous sommes en train de sortir. Ou peut-être est-ce juste le tangage soudain fort et la panique de ma fille qui m’ont mis la puce à l’oreille… Maëlyss vient se blottir contre moi sur la couchette, et nous entendons les drisses courir sur le pont. Sylvain et Fanch doivent être en train de monter les voiles.
5h. Le moteur est toujours en route.  J’imagine que les gars sur le pont galèrent un peu à trouver les bons réglages et à lancer le bateau. Je verrai plus tard que sur les voiles ils ont pris le 1er ris et à peine ouvert le génois (navigation de nuit avec un vent de 15 nœuds en moyenne, toutes les précautions sont prises, et le port des gilets de sauvetage une évidence). Johann, l'ami d'un ami que je ne connais pas encore mais qui aimablement nous donne plein d'infos utiles, m'a précisé qu'utiliser la trinquette aurait été plus judicieux, car la tenue de cap du bateau est meilleure avec la trinquette qu'avec un génois à moitié déroulé. On peut confirmer que diriger le bateau fut compliqué dans la configuration choisie !
Le tangage reste fort et très désagréable. Bien que serrée contre moi et blottie sous la couette, Maëlyss est vraiment en stress. On sent un virement de bord assez brusque : les hommes sur le pont viennent de se rendre compte de la difficulté d’appréhender les distances dans le noir : la cardinale nord* était tout près ! La manœuvre est brusque, mais la houle n’y est sans doute pas étrangère non plus. D'ailleurs, ils n'ont pas réussi à la contourner de la bonne façon, et l'ont passée par le sud... heureusement sans problème (sans commentaires !)
* Cardinale : tour métallique qui indique un danger, et qu’il faut contourner du bon côté, selon les indications qu’elle donne (par bandes de couleur en journée, feu clignotant la nuit).
C’est à ce moment-là qu’il faut aiguiller rapidement Maëlyss pour éviter que … -je cherche une formule poétique…- le contenu de son estomac ne viennent réchauffer le lit (désolée, il n’y a sans doute aucune façon élégante de parler d’un mal de mer violent…). Je n’entrerai pas dans le détail de l’heure suivante, par respect pour les lecteurs. Mais nous expérimentons le bon vrai gros mal de mer dans toute sa splendeur. Il me faudra plus de 10 minutes pour réussir à m’habiller et rejoindre le reste de l’équipage sur le pont.
Le vent vient encore une fois de la destination que nous tentons de rejoindre, il faut louvoyer. A cette allure, la durée de navigation va sérieusement s’allonger.
Si le vent frais m’aide un minimum, il me transit également de froid. Heureusement que les potes sont là, il m’est impossible d’aider Sylvain. Devant le piètre état de l’équipage et la pénible navigation, Sylvain propose généreusement de lâcher l’affaire et de rentrer. On est tous d’accord, surtout Maëlyss qui entonne un chant pour « fêter ça », et que nous reprenons avec elle. Le retour sera bien plus rapide.
6h. Nous voilà devant le port, je n’ai pas encore vraiment repris mes esprits. Mais pour bien finir cette nuit mémorable, c’est le moteur, capricieux, qui décide de ne pas démarrer, malgré plusieurs tentatives. Impossible de rentrer à la voile : on vire de bord, il faudra naviguer devant le port jusqu’à trouver une solution. Sylvain vérifie les batteries et tout ce qu’il peut, essaie encore. Le moteur finira par redémarrer, à notre plus grand soulagement. Si cela n’avait pas été le cas, nous aurions contacté la capitainerie pour demander un remorquage. Mais je ne sais pas s’il y a du personnel pour cela la nuit, où s’il nous aurait alors fallu tourner en rond en attendant l’équipe de jour.
Bref, on accoste alors que le jour se lève. Nous ne verrons que l’aube, nous sommes tous couchés avant que le soleil n’ait pointé son nez ! Encore un plan contrarié, mais formateur…
 en mode "explosée", après une courte et dure nuit...

La révision moteur sera faite cette semaine, car pas question de ressortir avec une telle difficulté. Le lendemain, on a juste profité du soleil, mais au quai, et c'était déjà pas mal !

samedi 10 mars 2018

Un projet en évolution

Le projet initial était de naviguer en Méditerranée, pendant notre sea trip de 8 mois, parce que nous débutons sur l'eau, et qu'on estimait plus sécurisant de rester plus ou moins tout le temps à proximité de côtes. Mais des discussions avec des marins, ainsi que nos propres recherches, nous ont amené à comprendre que l'idée n'était finalement pas fabuleuse, pour deux raisons essentielles.

La première, c'est que notre période de navigation sera majoritairement hivernale, et que les conditions météos en Méditerranée sur ces mois-là sont loin d'être agréables, parce que "ça tabasse tout le temps". En clair : il y a souvent du vent fort, et il est particulièrement changeant et imprévisible. On s'en est effectivement rendus compte presque à chaque fois qu'on a voulu sortir ces derniers mois. On regardait la météo en direct jusqu'à l'instant de larguer les amarres, et une fois en mer, il était plus fort que prévu, ou très changeant. Et franchement, c'est pénible.

La deuxième raison qui nous a fait reconsidérer cette destination, est la température moyenne sur les destinations que nous envisagions. En février, en Grèce, il fait 15°, et un vent quasi-permanent, qui vient plus volontiers du Nord que du Sud.

Alors un soir, on s'est dit : "bon, on part des mois entiers sur la période hivernale, on ne peut pas décaler ce séjour, et comme depuis ces 12 dernières années on n'est partis qu'une fois au soleil, ça va pas être possible !" Parce que oui, nous aussi on veux se trimballer en petit débardeur sur le pont, et laisser le soleil dorer nos peaux jusqu'à ce qu'elles soient couleur pain d'épice, que diable !

Direction You Tube, pour voir des vidéos-témoins de personnes qui ont traversé l'Atlantique, la voix de quelques marins résonnant encore dans un coin de nos têtes : "Si tu prends les alizés à la bonne période, l'Atlantique c'est super tranquille..." Les vidéos confirment : on voit des navigateurs sereins, des dauphins, un vent favorable et modéré... Comble du bonheur, on se rend compte que les bonnes périodes pour traverser l'océan s'étalent de fin novembre à fin mai. Pile-poil dans le timing prévu !

Google Images avec le mot-clé "Antilles" fini de faire chavirer nos cœurs. On étudie le parcours, et les temps de navigation : en partant le 1er octobre, et en prenant le temps de visiter un brin les pays que nous longerons, on arrive au Cap Vert début à mi-novembre. Puis on guette la météo, et dès que les vents sont posés, on entame les deux semaines de navigation qui nous mèneront aux Antilles. Bon, deux semaines, c'est l'objectif, mais comme tout dépendra du vent, disons qu'on devrait mettre entre 12 et 20 jours pour traverser.

Deux mois pour l'aller, autant pour le retour, ça nous laisse 4 mois sur place, ce qui est un peu court pour visiter les dizaines d'îles des Antilles, et les hauts lieux touristiques d'Amérique Centrale. Mais c'est déjà bien, on s'en contentera, et on s'en mettra plein les yeux !

Toutefois, cette modification de projet entraine un surcoût important sur l'équipement su bateau. Il nous faudra :
- un dessalinisateur, pour ne pas avoir à charger une centaine de litres d'eau potable en bouteilles
- une capote de descente, pour utiliser facilement le taud et disposer d'ombre sur le pont
- un téléphone satellite, pour toujours pouvoir joindre des secours, si besoin, et accessoirement rassurer nos parents, qui se sont brièvement décomposés à l'annonce de notre nouveau plan...
- des panneaux solaires, indispensables au fonctionnement des appareils électriques embarqués, et dont on ne se passera pas : le GPS, les sondeurs, la radio, le frigo...

Bref, l'addition vient de s'alourdir franchement. Du coup, on réfléchit à des solutions de financement :
- braquer des mémés, c'est facile, mais pas sympa
- faire les poches de proxénètes, c'est certainement bien rentable, mais franchement dangereux
- vendre un rein, c'est pas suffisant
- vendre sur le bon coin tout ce qui est inutile dans la maison, ça prendrait des années
- intégrer le marché noir de revente d'authentiques cornes de licornes, je suis pas sûre que le marché soit très développé
Bon, à défaut d'avoir trouvé une meilleure idée, il faudra donc se rabattre sur un nouvel emprunt (c'est le banquier qui va être content !)...