lundi 9 avril 2018

Action formation

Si le hasard fait parfois bien les choses, et pour peu qu'on s'ouvre un minimum à ce que la Vie a à nous offrir, il en résulte des moments forts et de belles rencontres. Ce fut le cas ce week-end, pour notre plus grand plaisir !
 
Il y a quelques temps, des amis nous ont parlé de copains à eux qui avaient relié l'an passé en voilier Lorient à Bali, en passant par la Méditerranée et le canal de Suez. Ils proposaient de nous mettre en contact pour que nous puissions grapiller des infos utiles auprès des bons navigateurs qu'ils sont. La phobique sociale que j'étais jusqu'à il y a quelques années aurait dit "non" catégoriquement, mais heureusement, de fabuleuses rencontres et un ami plus que parfait m'ont largement aidée à sortir de ce  fonctionnement assez handicapant, et nous avons donc contacté ces hommes. Les premiers échanges par messages m'ont tout de suite mise en confiance (grande nouveauté pour moi ! Apprécier quelqu'un avant même de l'avoir rencontré, ça frise le surréalisme...), et nous attendions avec impatience ce week-end de formation avec eux.
 
Eux, ce sont Johann et Valentin, deux hommes en or qui ont fait preuve de patience et de pédagogie tout au long du week-end. Un vrai bonheur !
 

 
 
Le plan initial était une escapade jusqu'à Marseille ou si possible aux Calanques, avec navigation de nuit et court mouillage, mais la météo en a décidé autrement. Nous guettions les jours précédents un vent assez fort, que nous redoutions et qui s'est bien manifesté. Samedi, bien que les prévisions marines annoncent un vent pointant jusqu'à 50 nœuds, nous décidons de sortir, quitte à ne pas aller loin pour revenir à l'abri dès qu'il forcirait. Je m'arme de plans anti-mal de mer, la dernière sortie m'ayant laissé un mauvais souvenir : Mercalm, bracelets d'acupression et menthe poivrée, je suis parée !
 
Finalement, le matin, nous naviguerons 1h30 au moteur avant qu'Eole ne daigne pousser un minimum nos voiles. Le vent reste modéré une partie de la journée. Un peu stressée, je demande quand même un demi-tour en début d'après-midi, redoutant de nous retrouver dans des conditions météo difficiles. Pourtant, je ne suis pas plus inquiète que ça : si nous nous n'avons pas l'habitude, Johann et Valentin ont essuyé de sacrés grains et des conditions météos pourries un paquet de fois au cours de leur périple, ils sauront gérer. Ils nous montrent l'utilisation de la trinquette, les bons réglages de voile, comment aborder les vagues et quelques manœuvres. Avec tous ces bons conseils, le bateau gîte beaucoup moins que ce que nous avions expérimenté jusque là, et nous nous rendons compte que même si ce n'est pas foncièrement agréable, il est possible de naviguer par 25 nœuds de vent sans trop de difficulté. La journée passe vite, et nous rentrons par vent frais (22 à 27 nœuds) dormir au port.
 
Dimanche, on prend le temps de trainer un peu au lit, le vent annoncé est encore important. On étudie les cartes marines, on apprend à bien les utiliser et à reporter des coordonnées GPS. Le temps passe trop vite, et l'après-midi on opte pour quelques manœuvres au port. Le vent, toujours présent et montant à 25-30 nœuds, vient compliquer un peu la tâche, mais après tout, au cours de notre voyage il ne s'en privera pas, autant apprendre ces manœuvres en étant nombreux à bord.
 
 
 
Pour finir, nos amis nous proposent d'amarrer le bateau sur pendille*, toujours dans notre port, car dans la plupart des structures où nous amarrerons, c'est ce système qui est utilisé. Le vent a forcit, rendant la manœuvre périlleuse, mais on s'applique, et on est sur le point de finir l'amarrage quand la corde se prend dans notre hélice ! Il faut aller la libérer, et l'eau est bien froide. On n'a évidemment aucune combinaison, mais Johann n'hésite pas à plonger en t-shirt et en apnée, Valentin est prêt à prendre le relai si nécessaire, et les deux suscitent forcément en moi une grande admiration, car personnellement j'aurais préféré payer une fortune un plongeur pour aller faire le boulot plutôt que d'y aller moi-même, surtout sans équipement ! 
Mais la corde est bien coincée, et la tâche s'annonce vraiment compliquée. On cherche un plan B quand tout-à-coup on se rappelle avoir aidé notre voisin le midi-même à charger sur son bateau ses affaires... de plongée ! Sylvain va lui demander un coup de main, qu'il nous accorde très généreusement, en plongeant lui-même, mais bien équipé, pour libérer l'hélice (merci Christian !). Il lui faudra néanmoins couper la corde, et Valentin la réparera avec une nœud magnifique que je serais bien incapable de reproduire... Mais j'ai un livre des nœuds, je remédierai à cette lacune !
 
*pendille : corde fixée sous l'eau qui permet d'amarrer l'avant du bateau en l'absence de pontons latéraux ou poteaux. On l'attrape au niveau du quai sur lequel on amarre l'arrière du bateau.
 

 
 
Les hommes trempés se réchauffent tant bien que mal à renfort de serviettes, couvertures et boissons chaudes, et on se dirige enfin vers notre place de port. La force des rafales s'est encore intensifiée, et rentrer le bateau dans sa place relève de la mission impossible, le vent plaquant inlassablement notre bateau sur les poteaux sans lui laisser le temps de manœuvrer, même si on met le moteur à fond. Les tentatives se succèdent, sans aboutir, et un ultime essai nous fera vite comprendre que trois personnes motivées ne suffiront jamais à retenir un bateau propulsé trop vite sur un poteau... La manœuvre échouée me laisse sur la touche (et me vaudra quelques petits points de suture), mais l'équipe de la capitainerie arrive pour nous aider. Heimoana s'amarre enfin au quai, grâce à leur aide, et la journée se conclut avec un petit goût de "faudra pas faire ça trop souvent".
 
 Les gars murmurent que la pendille c'était la manœuvre de trop, mais je crois que non : c'est bien d'avoir pu l'apprendre, sans quoi nous aurions été bien embêtés la première fois que nous devrons utiliser cet amarrage. Et moi je pense que c'est LA fin de journée dont on parlera encore dans dix ans en rigolant comme des baleines !
 
 
 
On se quitte rapidement, mais le week-end est passé trop vite, il faudra remettre ça ! Merci, Val et Jo, pour ce week-end mémorable, de nous avoir partagé vos compétences et pour les chouettes discussions partagées ! 😉