Au bateau depuis la veille, le réveil est bien difficile pour moi, car des vertiges intenses et persistants me tiennent compagnie depuis plusieurs jours. Alors, j'en vois venir certains, mais non, rien de ce que vous imaginez. Je viens seulement de comprendre pourquoi, quand on a un traitement permanent pour la tension artérielle, c'est un peu bête de le suspendre pendant des semaines... Bref, je passe du lit au canapé, lamentablement, quand survient un problème : la caisse d'eaux noires déborde ! Pas le choix, faut aller en mer la vider. La météo donne du 15-20 noeuds pour le matin, augmentant l'après-midi... En plus c'est un vent du nord : le bien froid qui nous gêne pour manoeuvrer au port. Génial.
Branle-bas de combat ! On se dépêche de sortir avant que le vent ne soit trop fort, mais dans mon état, je ne sers pas à grand-chose, et Sylvain doit se débrouiller plus ou moins tout seul.
Entre mes vertiges qui ne passent pas et une bonne houle, j'ai l'impression de tourbillonner sans fin, et me cramponnne, en boule, sur le pont. Malgré la gîte (le tanguage si peu plaisant du bateau), Maëlyss bouquine tranquille dans sa cabine. Killian est serein, en tout cas en apparence, et Sylvain s'en sort pas si mal : ayant déployé partiellement les voiles, avec un vent dans le bon sens, on navigue à 6 noeuds, et une gîte très modérée. (Mais ça, c'était juste pour le départ, ah ah ah ! )
Un peu stressés tout de même, on n'atteindra pas les 6 miles règlementaires (11km des côtes) pour vider (oups!). On entame rapidement un retour, qui s'avère vite un peu cahotique. On a le vent de face, il faudra louvoyer (zigzaguer face au vent, et donc virer souvent de bord). Le vent est motivé, il nous pousse à 25 noeuds. Et en naviguant vers le vent, la gîte s'intensifie. Les embruns nous "saucent", et le bateau vire de bord tout seul (c'est à ce moment-là qu'on se dit qu'on gère comme des blaireaux...).
Je me cale à la barre, les vertiges me laissant enfin tranquille (chassés par la montée d'adrénaline, sans doute...) car le pilote automatique a du mal. Je n'y arrive pas vraiment mieux que cette belle technologie, mais au moins ça m'aide à me focaliser sur une seule chose : le point visuel qui nous ramène au port (plutôt que sur l'eau qui affleure le pont...).
On galère : au près, le nez du bateau monte et descend beaucoup (il y a un terme pour ça, mais j'ai oublié) et on avance lentement, ce qui rend la tenue du bateau difficile ; au largue, le bateau penche sacrément, et on s'éloigne de notre cap. On fait ce qu'on peut entre ces deux allures. Nous prenons tant bien que mal un deuxième ris, pour réduire encore notre grand voile, et notre mal en patience. J'ai mal aux bras et aux doigts, crispée comme tout sur cette nav' qui prend une drôle de tournure, mais ne quitte pas des yeux mon objectif. On s'en approche lentement, à 2-3 noeuds. Mais je vois des dizaines de kitesurfeurs, qui s'éclatent devant l'entrée du port ! (C'est là que mon bon sens aurait dû tiquer, mais non, il était sans doute parti sur le dos d'une rafale de vent...) Ca m'agace, ils n'ont rien à faire là ! Killian me demande pourquoi l'eau change de couleur, je lui réponds que c'est parce que c'est moins profond. (Là aussi, j'aurais dû me rendre compte qu'un truc clochait.) Ce n'est que quelques instants plus tard, en ne reconnaissant pas l'entrée du port et en voyant la cardinale droit devant alors qu'on devrait l'avoir bien à tribord qu'on se rend compte qu'on n'a pas pris le bon repère pour rentrer !
Les kitesurfeurs sont donc bien sur leur spot, meublé d'un large banc de sable sur lequel nous aurions pu nous échouer lamentablement, et je me sens un peu con de m'être plantée (pour ma défense, j'avais retenu qu'il fallait suivre le chateau d'eau, mais jamais percuté qu'il fallait suivre celui de gauche, puisqu'il y en a 2 d'assez proches, surtout quand on vient du large de l'Espiguette...).
Nous finissons par rentrer à bon port, après 3h très ...heu... formatives ? On se dit que pour les quelques cours à venir, ce serait une bonne idée de chercher à sortir par bon vent, histoire de bien acquérir les bons gestes.
Après une manoeuvre de Sylvain impeccable et un amarrage du premier coup qui m'épate (chance ou coup de main de maître ? 😂) , je me plonge sous une couverture, avec le cours des Glénans, pour essayer de comprendre ce qu'on aurait dû faire différemment. Bon, faudra que je relise avec un peu plus de caféine dans le sang, parce que là, ça me laisse un peu dubitative...
Pendant ce temps, Sylvain et les enfants font un saut à la capitainerie, où ils apprendront que tout l'année, on dispose d'un service gratuit de vidange des caisses noires ! Sur simple appel, un bateau vient devant le notre et aspire le contenu nauséabond... On savait que le service existait, mais on pensait qu'il n'était effectif que l'été. Qui plus est, et je l'apprendrai plus tard, chaque port est équipé d'une station de vidange des eaux noires, qu'il convient d'utiliser autant que possible, c'est quand même mieux que de vider en mer. Voilà voilà...
Et histoire de bien finir la journée, un peu de matériel est malencontreusement tombé au fond de l'eau, et la pompe à eau est morte. De quoi nous occuper les jours suivants !