vendredi 26 avril 2019

Quelques jours de vacances en amoureux (3/3)


(je me rends compte en passant par là que je n'ai jamais posté cette troisième partie de notre sortie... d'avril dernier ! La honte... L'article était prêt, n'attendant que les photos. Je le poste donc maintenant, bien que pour le coup il sente un peu la naphtaline).

Vers midi, le vent rafale encore, mais il est mollissant, nous décidons donc de quitter le bateau pour aller manger à Cadaqués. On se balade un moment, parcourant nombre de petites ruelles charmantes, avant de nous arrêter à la terrasse de L’Hostal. C’est un petit restaurant quasiment en front de mer, où il sera un peu difficile pour Sylvain de trouver un plat sans viande, ni poisson ni fruits de mer. Moi je me régale d’un loup, puis nous continuons nos déambulations.




On croisera, au détour d'une rue, 4 jeunes sangliers pas farouches pour un sou, qui cherchent leur nourriture à côté du parking, au coeur du village. Normal...

De retour sur Heimoana en fin d’après-midi, nous quittons la baie, et entamons notre retour, déjà ! Notre collègue a sans doute hâte de nous voir rentrer (il s’est tapé des journées difficiles), ainsi que nos enfants. Nous retournons sur le mouillage de Cala Culip, ce n’est pas bien loin mais c’est toujours ça de moins à faire le lendemain.

En soirée, je suis à nouveau malade. Certes pas le mal de mer des 2 premiers jours, mais j’ai attrapé froid, malgré toutes mes épaisseurs, et la fièvre me fait agoniser sur ma couchette. Je n’ai pas l’habitude de prendre de Doliprane, et attend simplement que cela passe.

En meilleure forme le lendemain, je prends la barre direction Collioure. On en a souvent entendu parler, et nous allons nous y arrêter brièvement, pour visiter. On navigue au moteur ; le vent, après avoir été un peu trop vif pendant plusieurs jours, est parti geler d’autres populations plus lointaines. Comme Port Lligat et Cadaqués, l’application sur laquelle nous cherchons nos mouillages indique que l’ancrage est interdit et qu’il faut s’amarrer sur bouée. Mais comme sur les villages précédents, il n’y a pas de bouées, et nous jetons notre ancre, comme deux autres voiliers. Puisqu’il faut bien qu’il y ait un avantage à naviguer en saison morte (et froide…), les communes ne sont pas casse-pieds avec les rares voiliers de passage. 

Après la blanche Cadaqués, nous découvrons donc avec beaucoup de plaisir la très colorée Collioure. On sent bien que le tourisme est majeur dans la vie du village, néanmoins il a une âme vibrante, et les habitants sont aussi hauts en couleur que leurs ruelles. On y mange, et nous promenons longuement. Le soleil est au rendez-vous, et j’ai enfin « pas froid ».




En fin de journée se pose la question de reprendre la mer, pour avancer de quelques miles, mais à partir de là tous les mouillages sont « bof » : trop exposés aux vents et à la houle, car la côte de Collioure à chez nous est parfaitement plate et lisse. Nulle crique rocheuse dans laquelle s’abriter, et un vent un peu plus fort dans la nuit nous font préférer rester en baie de Colllioure. Nous paressons donc tranquillement sur le pont pour profiter des derniers rayons de soleil, et savourons à l’avance la soirée tranquille qui s’annonce.


C’était sans compter sur le débordement de la caisse à eaux noires, juste avant de passer à table. La caisse à eaux noires, c’est le nom presque poétique de la cuve qui stocke le contenu du toilette. Pour ne pas laisser nos déjections n’importe où, nous les stockons, et vidons la cuve uniquement en pleine mer, où cela ne dérange personne (on se dit que les promeneurs de bord de plage doivent apprécier la démarche…). Bref, on a cru l’avoir vidée, mais la vanne s’était bouchée.
Je passerai rapidement sur des détails aussi inutiles que dégoutants, mais il nous faudra 2h30 pour réussir à repérer le problème, se retrouver littéralement « dans la m… », et nettoyer. Le problème venait d’un simple mouchoir en papier, car si j’avais bien pensé à embarquer beaucoup trop de nourriture, j’avais en revanche oublié de vérifier le stock de papier toilette, et il a bien fallu improviser jusqu’à un ravitaillement. Ô ami lecteur, songe 5 minutes à l’ineffable joie du tout-à-l’égoût domestique et savoure ta chance…

Côté romantisme, pour le reste de la soirée c’est bien mort. Sylvain se débarbouille longuement, puis on regarde un film histoire de penser à autre chose. 

Au petit matin on se réveille sous la pluie. Si la veille on s’était motivés à faire encore une étape avant de rentrer, là, on n’a plus qu’une envie, c’est de rentrer direct. On sait qu’on passera toute la journée à pétole : pas un pet de vent pour nous pousser. On prend notre cap direct, et droit devant nous on aperçoit de gros nuages et des averses. Mais toute une partie de la journée, le soleil voilé daignera nous réchauffer un peu.

Voyons le côté positif : si le moteur génère un bruit majeur et agaçant, on l’utilise parce que la mer et le vent sont très calmes. On va donc pouvoir vaquer à nos occupations, et même faire à manger et manger !


La côte s’éloigne lentement. A plusieurs reprises on distingue des bancs de poissons, sans bien savoir à quoi nous avons affaire, néophytes que nous sommes. Le premier banc montrait quelques ailerons fins et hauts, mais pas caractéristiques des dauphins. Des requins ? 
Ensuite, ce sont des colonies d’oiseaux qui chaque fois attirent notre attention sur un banc de poissons. Pas de dorsales pour ceux-là, ou alors une très petites. Gros gabarits : sans doute un bon mètre, mais cela n’effraie pas les oiseaux qui tentent de se poser sur leurs dos chaque fois qu’ils affleurent. Le spectacle est étonnant. 

Dans l’après-midi, le temps s’étire en longueur, comme suspendu. Maintenant qu’on est en route vers notre port, on a hâte d’arriver. D’autant qu’en 6 jours de navigation, nous n’avons jamais dormi dans un port, mais seulement au mouillage. Ça veut dire : pas de douche, parce qu’on a que 2 tanks d’eau douce, et qu’il faut l’économiser. L’hygiène s’est résumée à un débarbouillage, en même temps c’est pas comme si on avait sué de folie. En revanche, mes cheveux qui tiennent debout tout seuls me supplient de faire quelque chose, mais à part en faire des dreadlocks façon Jack Sparrow, je n’ai rien de bien transcendant à leur proposer. Je suis tentée d’aller me faire un shampoing, parce qu’allez, après tout, on arrive au port dans la nuit alors même si je fini l’eau c’est pas grave. Mais bon, je suis malade, et ai encore comaté dans le carré pendant un accès de fièvre, alors on va pas en rajouter (je n’ai pas de sèche-cheveux, évidemment).

Nous laissant bercer par un très léger mouvement marin, nous pouvons donc bouquiner. Je me régale des récits de grands navigateurs : Bernard Moitessier, Eric Tabarly, Florence Arthaud, François Gabard... Ils ont en commun une volonté hors du commun et la passion dévorante de la mer, même si chacun a un parcours propre dans une époque différente, sur des bateaux de conception de plus en plus technologique (Moitessier n'avait même pas une radio, alors que Gabard s'est fait tracté sur une planche par son multi-coque qu'il dirigeait avec sa montre-télécommande !). J'admire le chemin qu'ils ont parcouru, quelles que soient les difficultés rencontrées, et leur fascinante persévérance. Pourtant, je me sens plus proche de Capitaine Rémi (je vous laisse chercher "Capitaine Rémi Atlantique" sur le net...) que je ne le serai jamais d'eux.

On a réussi à enfin se mettre en t-shirt ! Une heure en une semaine de vacances… Le reste du temps, je portais au moins 2 pantalons et 3 pulls, dont 2 polaires, sous mon manteau spécial voile. Un pantalon et un pull la nuit, parce que ma couette était chaude, et qu’il faisait au moins 12 degrés dans le bateau (ce luxe…). M’enfin, on a bien profité quand même !

En fin de journée on parvient à remettre un peu les voiles, et on apprécie le silence après 9h de moteur. Mais quand la nuit tombe, je me réfugie dans la cabine en disant à Sylvain qu'il peut m'appeler si besoin (sous-entendu : débrouille-toi tant que tu peux, j'ai trop froid pour avoir envie de barrer !). Il gère donc seul la navigation de nuit, et nous arrivons à Port Camargue  à 1h30 du matin.






Fatigués mais désespérément craspouilles, nous branchons le bateau à quai pour lancer le chauffage, et filons prendre une douche ! J'aurais donné un rein pour une douche brûlante, et manque de bol elle est juste tiède. Je me rabats sur le sèche-cheveux, que je laisse fonctionner encore longtemps après que mes cheveux soient secs.

Une bonne nuit de repos au quai dans un bateau chauffé fait tout notre bonheur, pour nous partons retrouver nos zouzous, et le collègue qui doit s'impatienter de notre retour au moins autant qu'eux...

 (Oh, encore un coucher de soleil... J'ai l'air d'une nana obsessionnelle, mais voir le ciel se coucher sur la mer est d'une beauté sans nom, toujours différent, et mes photos ne reflètent hélas pas l'incroyable magie de ces instants).

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire